Quand l’Intelligence Economique devient Territoriale : principes et agenda de recherche

Ali Amairia

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N°1 / Varia

Quand l’Intelligence Economique devient Territoriale : principes et agenda de recherche

Ali Amairia

Résumé

Mots-clés

intelligence économique

région

Connaissance

développement

intelligence territoriale

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Introduction Le Conseil Régional (CR) est l’acteur central du développement économique, social et culturel de la Région. Il a pour mission de gérer, accompagner et soutenir tous ses territoires grâce aux travaux de ses directions sectorielles. Au fil des années, les lois successives de décentralisation attribuent aux Régions des compétences et responsabilités supplémentaires. L’économie, la vie sociale, l’emploi, la santé, l’éducation… sont autant de sujets qu’un Conseil Régional doit s’approprier pour guider au mieux la population. L’organisation des directions régionales devient alors très importante pour adapter l’accompagnement des acteurs sur tous les sujets qui font le territoire.  Pour mettre en place des actions publiques efficaces tout en assurant une proximité avec les territoires, il est indispensable de connaître, comprendre les acteurs et leurs environnements. La maîtrise de l’information est donc essentielle pour assumer ces rôles et répondre aux exigences régionales. En effet, un Conseil Régional qui doit gérer de multiples problématiques doit pouvoir s’appuyer sur un système de connaissance solide pour adapter son action grâce à ses politiques publiques. Cependant, les équipes en charge de la production de connaissance sont confrontés à une quantité de données en circulation qui ne facilite pas l’exercice car il ne suffit pas de collecter un maximum d’informations, il faut qu’elles soient utiles à l’action. Plus l’information est précise, plus les actions pourront répondre aux besoins. Collecter, décrypter et diffuser la connaissance sont des activités qui s’appuient sur des méthodes et une certaine expertise dont le CR a besoin. Au-delà de la vision économique par le soutien aux entreprises via des actions d’Intelligence Economique, ou la mise en place de projets d’ingénierie locale pour le développement durable en Intelligence Territoriale, la Région est confrontée à de nouvelles problématiques qui émergent posant la question de l’adaptation de ses méthodes de recherche. L'environnement, les crises sanitaires ou encore la guerre économique (Laïdi, 2016), apparaissent comme de nouvelles épreuves qui impactent tous les territoires et par conséquent modifient le travail réalisé par les services régionaux. De ce fait, les Régions françaises doivent adopter une approche systémique pour converger vers un développement équilibré et transversal, associant IE et IT. Il convient donc de parler d'Intelligence Economique Territoriale (IET). Nous proposons une grille de lecture de cette intelligence régionale, héritage des deux premières approches du développement. Le CR, acteur institutionnel majeur des territoires a l’opportunité de s’appuyer sur l’IET pour conduire le développement et l’aménagement du territoire. Face aux différents points de vues (IE et IT) et aux compétences de l’institution régionale, nous essaierons de déterminer en quoi l’IET peut permettre à un Conseil Régional de développer des actions et politiques adaptées aux territoires et leurs acteurs ? Nous présentons en première partie les principes de l’IE et de l’IT en France, puis dans une deuxième partie l’association de ces deux champs d’études à travers l’émergence de l’IET. Nous discutons ensuite l’intérêt pour une Région d’adopter une approche systémique du développement à travers les principes de l’IET. En dernière partie nous mettons en évidence trois perspectives d’études sous forme d’un agenda de recherche. <div style="border:solid windowtext 1.0pt; padding:1.0pt 4.0pt 8.0pt 4.0pt"> Méthodologie Cette étude s’inscrit dans le contexte d’une recherche en cours sur l’Intelligence Economique Territoriale. Dans le cadre de ce projet, nous menons une recherche intervention au sein d’un Conseil Régional et plus particulièrement dans le service en charge de produire des études et analyses à destination des différentes directions régionales. Pour cela, nous analysons leur système de production de connaissances qui évolue par l’intermédiaire de nouvelles méthodes de recherches. À partir de ce terrain de recherche, d’entretiens qualitatifs, de contributions sur le terrain, de la lecture de papiers scientifiques de référence, nous revenons sur les principes de l’IET que nous mettons en relation directe avec les Régions. Nous proposons à la suite de notre argumentation un agenda de recherche pour provoquer des travaux et débats scientifiques autour de cet objet d’étude. </div>   1. De l'économie au territoire, une intelligence au coeur du développement L’IE et l’IT sont deux perspectives de développement qui s’appuient sur la maîtrise de l’information pour soutenir le développement adapté. 1.1 Intelligence Economique 1.1.1 La naissance de l'Intelligence Economique en France L’Intelligence Economique est née en France en 1994, grâce au rapport Martre devenu depuis, une référence. Les auteurs présentent l’IE, évaluent la gestion stratégique en France et sensibilisent les professionnels à l’adoption de bonnes pratiques. Ce rapport s’inspire de l’IE pratiquée par d’autres pays qui exploitent cette discipline depuis plusieurs années déjà. En parallèle, il met en évidence la fonction importante d’acteurs tels que les collectivités territoriales, les entreprises ou encore l’état qui doit s’impliquer dans une politique d’IE (Lienemann et al., 2021). La fonction des Régions est décrite, sur le plan offensif comme sur le plan défensif, comme un facteur-clé de compétitivité vis-à-vis de la concurrence étrangère. Selon Martre (1994), dans les économies nationales les plus agressives, la circulation de l'information, entre les entreprises, les administrations et les collectivités territoriales, joue un rôle capital. Cependant, l’approche territoriale semble quelque peu mise de côté par rapport à l’orientation économique et sécuritaire de ce premier rapport, sans doute influencée par le contexte géopolitique de l’époque. De plus, les Régions n’avaient pas les mêmes compétences et capacités d’actions qu’aujourd’hui en matière de développement économique et territorial. Dix ans après ce travail, Bernard Carayon apportera des précisions et une mise à jour de l’IE grâce à son rapport d’information (commissariat général au plan). Son étude a constitué un pas supplémentaire dans l’élaboration d’une grille de lecture étatique des enjeux informationnels des entreprises (Harbulot, 2004). Apportant des précisions et des critiques, ce travail s’avérera considérable. Premièrement, sur le fait qu’il y a un manque de considération de l’IE en France. D’autre part, il parlera pour la première fois d’Intelligence Economique Territorial comme une approche territoriale de l’IE. Là aussi, à l’instar du premier rapport, les collectivités territoriales sont décrites comme des moteurs de développement.   Ces deux premiers rapports sont à l'origine de l'IE en France. Si le premier fait un état des lieux et présente cette discipline, le second va plus loin en élargissant le champ disciplinaire vers l’intelligence de l’économie territoriale. A la suite de ces travaux et de la montée en puissance de l’instabilité géopolitique mondiale, il y a eu un début de prise en compte de ces enjeux à travers des actions qui se sont progressivement diffusées sur le territoire national (mesures politiques, recherches scientifiques, créations d’écoles et de formations diplômantes…)   1.1.2. Les principes de l'IE L’Intelligence Economique se définit à l’origine, comme l'ensemble des actions coordonnées de recherche, de traitement, de distribution et de protection de l'information utile aux acteurs économiques obtenue légalement (Martre, 1994). C’est une démarche multidisciplinaire (Boya, 2010), collective, qui vise l'agilité par un usage stratégique de l'information (Moinet, 2021). L’IE se caractérise par un ensemble d'actions (veille, communication, influence, sécurité économique…) pour guider les décisions stratégiques de l’entreprise (Rochet, 2013; Salvetat, 2017) car il n’existe pas une, mais des pratiques d’IE (Salvetat, 2017). Un véritable outil de connaissance et de compréhension permanente de son environnement (Hamidou & Grari, 2018) qui permet de se défendre, mais aussi d’attaquer, car quel est l’intérêt d’être renseigné si on ne fait rien ? (De Fritsch, 2021). Toutes les organisations (privées ou publiques) ont besoin de l'information actionnable pour élaborer et mettre en &oelig;uvre de façon cohérente leur stratégie et tactiques (Martre, 1994). L’objectif est de toujours être le mieux informé, réactif, voire proactif (Deschamps & Moinet, 2011). Certainement, face aux nombreuses épreuves, les acteurs économiques ont peu à peu pris conscience de l'enjeu que représente une bonne maîtrise de l'information (Nora & Minc, 1978). 1.1.3. Le territoire comme nouveau paradigme L’IE pose à l’administration un véritable défi, défi à sa culture, défi à ses fondements juridiques, défi à ses méthodes de travail (Laurens-Bernard, 2013). L'économie est de plus en plus focalisée sur une approche horizontale des directives qui implique une sensibilisation de tous les acteurs et une mise en réseau des compétences (Knauf, 2006). Cette co-production d’intelligence collective nécessite un partage de l’information (Frimousse & Peretti, 2019) mais aussi l’adhésion à un ensemble d’innovations institutionnelles. Progressivement, un champ de l'IE s’est intéressé aux Régions avec davantage de prise en compte des problèmes, proches des citoyens et des territoires (Dubois & Fourati-Jamoussi, 2017). Des travaux au niveau de l’état ont aussi considéré ce paradigme émergent. Le 28 juin 2006, un rapport du Sénat « Energies renouvelables et développement local : l’Intelligence Territoriale en action » (Belot & Juilhard, 2006) proposait « d’inventer de nouvelles méthodes d’organisation et de fonctionnement performantes, en somme, de mobiliser l'Intelligence Territoriale ». Belot & Juilhard (2006) considèrent que les Régions disposent de nombreux leviers d’action pour promouvoir l’IT. Quelques années plus tard, le rapport n° 471 du 17 juin 2009 « Faire confiance à l'Intelligence Territoriale » (Krattinger & Gourault, 2009) aura une importance car il fait partie d’une série de réflexions territoriales qui aboutiront à la loi n°2015-991 du 7 août 2015 portant Nouvelle Organisation Territoriale de la République (NOTRé). Cette réforme accorde plus de capacités aux Régions pour le développement économique et social des territoires. Elle permet aux Régions de se saisir de l’IE et de glisser vers une IT primordiale dans ce nouveau contexte (Dou et al., 2019). Selon Carayon (2003), la Région possède tous les atouts pour appliquer une politique nationale d’IE, et promouvoir une mise en &oelig;uvre spécifique d’intelligence de l’économie territoriale. 1.2. Intelligence Territoriale 1.2.1. De l'Intelligence Economique à l'Intelligence Territoriale   L’Intelligence Territoriale est une innovation française (Juillet & Clerc, 2018) qui est apparu au plus tard selon (Girardot, 2004) en 1989, au terme de l'expérimentation Catalyse. Cette méthode d’IT mobilisait les informations détenues par la communauté territoriale pour améliorer la pertinence, l’efficience et l’impact des actions de développement conduites à l’échelle d’un territoire (Girardot, 2005). « L’idée de départ était que pour mieux surmonter les difficultés de la communauté, il fallait d’abord mieux se connaître soi-même et se communiquer. D’où la création d’outils fondés sur les technologies de l’information et de la communication naissantes pour stocker, traiter et diffuser les informations portant la connaissance d’un territoire » (Dumas, 2015). L’IT a dès son origine été influencée par des chercheurs et praticiens en gestion, en sociologie, ou encore en géographie. Leur approche de cet objet d’étude a permis d’apporter un nouveau regard sur le territoire et la manière de le comprendre car c’est un concept polysémique d’une grande complexité (Signoret & Moine, 2008) au c&oelig;ur des préoccupations des scientifiques, des politiques, mais également des acteurs économiques (Moine, 2006). De nombreuses actions d’IT sont, depuis son émergence, réalisées par les institutions régionales pour guider la prise de décision (Rochet, 2013). La coconstruction de diagnostics territoriaux, la politique contractuelle, la création d’observatoires… A l’instar de l’IE, ce sont des actions qui se basent sur la maîtrise de l’information mobilisant des méthodes de recherches appropriées. L’évolution socio-économique et les politiques de décentralisation successives ont amené les universitaires à élargir l’IE et à (re)considérer la Région et ses territoires, tout comme dans les premiers rapports (Carayon, 2003; Martre, 1994). Les espaces territoriaux se transforment et imposent aux acteurs de devoir s’adapter toujours plus vite aux évolutions. L’attention portée à l’entreprise et au développement économique, s’est donc peu à peu déplacée vers davantage de considération collective permettant de penser le développement durable. C’est dans ce sens que l’IT peut être comprise comme la mise en &oelig;uvre d’une démarche d’IE au niveau territorial (Goria, 2010; Juillet & Clerc, 2018). Un processus collectif de production de connaissance (Baumard & Harbulot, 1997) dont l’objectif est d’accroître l’agilité stratégique du territoire et de ses acteurs (Marcon & Moinet, 2006). Tout comme l’IE, l’IT se base sur la maîtrise de l’information (cf. encadré 1) pour stimuler et rendre possible le développement durable des territoires. Effectivement, les territoires sont des objets qu’il faut comprendre pour contribuer à leur développement. Taille, histoire, population… chacun possède de nombreuses caractéristiques qui le rendent unique. Proposer des projets et actions de développement doit par conséquent s’appuyer sur les spécificités de chacun d’entre-eux en passant par une phase de renseignement pour une meilleure connaissance du territoire (Dou, 2019). Cela dit, si l'origine s’avère commune, l'IT est progressivement devenue une pratique aux applications spécifiques (García-Madurga et al., 2020) en se démarquant de l’IE. D’après Girardot (2005), l'IT se distingue de l'IE qui concerne essentiellement l'information sur les marchés. L'IE correspond surtout à une technique d'aide à la décision pour les responsables économiques plutôt qu'un fondement de l'action communautaire où il est important de prendre en compte la dimension sociale (Girardot, 2004). De ce point de vue, l'IT est définie comme la capacité des acteurs à mobiliser données, informations et connaissances pour contribuer au développement durable d'un territoire (Bertacchini, 2012). Cette appropriation du développement a suscité une appétence de chercheurs et de gouvernements étrangers qui ont vu en ce champ d’étude, la possibilité d’engager des actions en faveur du développement durable des territoires. A la suite de ces premières recherches, un réseau mondial s’est peu à peu formé à l’occasion de la coconstruction d’initiatives territoriales (Masselot, 2004), de projets de recherche conjoints et de manifestations scientifiques. L’INTI (International Network of Territorial Intelligence)<a href="#_ftn1" name="_ftnref1" style="color:blue; text-decoration:underline" title="">[1]</a> constitué de chercheurs et d’acteurs territoriaux, utilise la recherche action pour mettre en place des actions sur les territoires. Pour cette communauté, l’IT représente le projet scientifique polydisciplinaire dont les communautés territoriales sont les sujets. Ils adoptent une vision systémique du territoire qui intègre un espace géographique, une communauté, ses représentations et ses comportements pour « répondre aux besoins du présent sans compromettre la possibilité, pour les générations à venir, de pouvoir répondre à leurs propres besoins » (Brundtland, 1987). Le modèle français s’est ainsi exporté mais marque un certain ralentissement scientifique sur le plan national. L’IT s’est principalement développée en Europe et a maintenant une résonnance mondiale avec l’entrée en jeu de l'Afrique, l’Amérique Latine (Argentine, Brésil, Venezuela notamment), du Canada et des États Unis (Dumas, 2011). <div> 2. Une Intelligence Economique des territoires 2.1. Le rôle de l'information   L’information est une ressource stratégique pour les acteurs économiques (Juillet, 2004) le territoire et son développement (Pelissier, 2009). Le recours aux diverses actions de renseignements constitue donc une carte maîtresse, tant sur le plan offensif (repérer les évolutions en cours, anticiper les tendances émergentes, les croiser avec les capacités régionales…) que défensif (risques liés au pillage/captation d’information, cyber attaques, impact local de la stratégie de groupes internationaux…) (Régions de France, 2020). Cependant, maîtriser l'information est de plus en plus subtil car il faut savoir décrypter, déchiffrer (Dou, 2019). L’information à haute valeur ajoutée est devenue une matière première précieuse et sensible, avec la difficulté non pas forcément d’y accéder, mais d’en évaluer la pertinence, de réellement l’exploiter et également de la protéger (Régions de France, 2020). En effet, analystes et observateurs croulent sous les données qui, à l'heure du Big data, sont générées quotidiennement en quantités astronomiques (Cassely & Fourquet, 2021). Ainsi, pour de nombreux acteurs, l'accroissement d’informations est synonyme de connaissances alors que la garantie de plus de données n'est pas la garantie d'une utilisation plus pertinente (Massé & Moinet, 2021). Pour Moinet (2012), il faut dépasser le sentiment d’être un géant en matière d’informations et un nain en matière d’action car pour conduire à l’action, l’information doit devenir connaissance. Effectivement, la culture basée sur l'information, ou pire, l'information encyclopédique, ne peut pas rivaliser avec une culture basée sur la connaissance (Zeleny, 2013). Que l’on soit un Etat, une Région, ou une entreprise, la maîtrise de l'information, c'est-à-dire la capacité à décrypter le dessous des cartes (Knauf et al., 2021) est indispensable à quiconque veut être acteur de son avenir. Ce n’est donc pas nécessairement le plus puissant qui l’emporte, mais bien le plus intelligent (Knauf et al., 2021). 2.2. L'Intelligence Economique Territoriale : un levier pour les Régions   L’IT entretient avec l’IE un rapport de proximité fondé à la fois sur la maîtrise de l’information, des similitudes de méthodes, ou encore des recoupements d’objectifs (Harbulot et al., 1997). Des chercheurs considèrent à ce titre l’IT comme une partie intégrante de l’IE car elle mobilise l’intelligence sociale, organisationnelle et culturelle. Brute de Remur (2016) voit même l’IT comme un pilier efficace et innovant de la politique publique d’IE, c’est-à-dire une évolution de l’IE vers plus d’attention du territoire et ses parties prenantes. Pour d’autres, c’est différent car l'IE est surtout une technique d'aide à la décision pour les responsables économiques plutôt qu'un fondement de l'action communautaire (Girardot, 2004). De manière générale, la littérature fait une distinction en présentant l’IE comme un soutien aux entreprises via des actions de veille, d’influence, de sécurité… pour contribuer au développement économique. D’un autre côté, il y a l’IT, une démarche plus territorialisée avec des actions (diagnostic territorial, ateliers participatifs, analyses territorialisées, création de SIT…) pour le développement durable et l’ingénierie locale. A l’échelle régionale, ces deux visions du développement sont naturellement complémentaires car le développement territorial nécessite d’utiliser des méthodes et outils d'Intelligence Economique (Dou et al., 2020). Lorsque nous analysons le rôle des Régions, nous voyons que le CR adopte une vision globale et transversale du développement. Les différents services régionaux mobilisent à la fois des actions en IE et en IT. Le pôle aménagement territorial utilise principalement les pratiques en IT alors que le pôle développement économique exploite la boite à outil de l’IE. En effet, il n’est plus envisageable de se focaliser exclusivement sur un élément du territoire sans considérer tous les autres. Economie, développement durable, santé… tous les sujets sont liés et les nombreuses crises actuelles en sont l’exemple parfait. La gestion du territoire évolue et le besoin de connaissances des espaces est devenu indispensable pour mener des actions publiques pertinentes. L’efficacité d'une Région repose sur une organisation territoriale adaptée et partagée (Carayon, 2003) que l’institution doit mettre en place. Certaines Régions l'ont pris en compte et se sont engagés dans des processus informatifs puisqu’il est nécessaire que les Régions adoptent un cadre structurant pour amorcer une dynamique territoriale maîtrisée (Lebrument & Rochette, 2020). S’intéresser à l’IET c’est non seulement s’interroger sur l’évolution des politiques publiques, mais aussi sur les nouvelles modalités d’actions et les nouveaux enjeux engendrés par la multiplication des parties prenantes à différentes échelles des espaces géographiques (Marchais-Roubelat, 2018). A l’instar de l’IE et l’IT, cette intelligence régionale repose sur des pratiques systématiques de circulation et de partage d’informations utiles pour en tirer le plus grand avantage concurrentiel au bénéfice du territoire et de l’ensemble des parties prenantes (Régions de France, 2020). C’est en résumé la capacité d’un territoire à anticiper les changements socio-économiques et à gérer les connaissances qui en découlent (Moinet & Coussi, 2014). <hr align="left" size="1" width="33%" /> <div id="ftn1"> <a href="#_ftnref1" name="_ftn1" style="color:blue; text-decoration:underline" title="">[1]</a> <a href="https://inti.hypotheses.org/" style="color:blue; text-decoration:underline">Territorial Intelligence (hypotheses.org)</a> </div> </div>   3. Discussion <img src="https://www.numerev.com/img/ck_2722_18_image.png" style="width: 768px; height: 284px; margin-left: 13px; margin-right: 13px;" /> Schéma : L’Intelligence Economique Territoriale : une intelligence régionale   L’Intelligence Economique Territoriale peut être assimilée à une politique publique d’IE (Lebrument & Rochette, 2020) dont l’objectif est d’assurer l’ensemble des prérogatives de sécurité et de défense économique d’un territoire (Lebrument & Rochette, 2020). Dans ce cas, c’est un schéma régional de développement piloté par la préfecture, la Région et les services de l’état avec une prépondérance d’actions d’IE. Dans ce papier, nous adoptons un point de vue différent car nous considérons l’IET comme une approche scientifique du développement régional. L’ambition est de proposer une grille de lecture renouvelée du développement régional que peuvent adopter les Conseils Régionaux. Plus qu’un soutien aux entreprises via des actions d’Intelligence Economique, ou la construction d’un territoire durable avec l’Intelligence Territoriale, les Conseils Régionaux peuvent adopter une démarche systémique d’IET où les deux visions IE et IT convergent. Nous focalisons ainsi notre recherche sur les pratiques des services régionaux à travers la maîtrise informationnelle. En effet, le CR qui gère de multiples problématiques doit s’appuyer sur un système de connaissances qualitatif pour permettre aux agents régionaux de mettre en place des actions publiques différenciées. Nos différentes recherches nous ont permis de constater de nombreuses pratiques d’IET mises en place par les directions régionales qui contribuent au soutien des différents acteurs des territoires. 3.1 L'information comme base de développement La maîtrise de l’information est une arme puissante au service de l’action. Que ce soit en IE pour gagner en agilité stratégique, en IT pour le développement durable, ou encore l’IET qui conjugue ces deux champs d’études à l’échelle d’une Région, la maîtrise informationnelle est la condition indispensable (flèches noires). Les différents acteurs des territoires (Kustosz, 2020) ont constamment besoin d’avoir les bonnes informations et aux bons moments. Le succès des projets vient principalement de la faisabilité de ces derniers en fonction des capacités et des connaissances locales (Dou et al., 2020). Plus la connaissance est qualitative, plus l’action sera adaptée aux acteurs et leurs territoires. La maîtrise de l’information est un processus actif qui ne cesse de se développer et de s’enrichir pour être au c&oelig;ur de toutes les stratégies (Dou et al., 2018b). Lors de la mise en place des actions (IE et IT) de nouvelles informations vont être générés. Les échanges institution-territoire, les rencontres entre acteurs ou encore les communications entre individus (Belaouni & Berass, 2017) permettent d’enrichir la première phase de renseignement (flèches noires rétroactives vers l’information) car le stock de connaissances n'est pas réduit lorsqu'il est utilisé (Boschma, 2004). Au contraire, ce stock peut s’accroitre et s’affiner car la connaissance prend une valeur lorsqu'elle affecte la prise de décision et se traduit en action (Tsoukas, 1996). C’est un processus sous forme de cycle continue qui s’enrichi au fur et à mesure. L'IET va se construire progressivement avec un processus dialogique, de partage, d'échange, de construction collective où les connaissances scientifiques convergent avec d'autres connaissances (Bozzano et al., 2013). 3.2 Les différents champs d'études   L’objectif de ce papier est d’apporter une attention particulière à l’IET que nous pouvons résumer par l’équation suivante IE + IT = IET. L’IE, l’IT ou l’IET ont une source commune (la maîtrise de l’information) mais peuvent avoir des caractéristiques différentes. Les objectifs, la méthodologie de recherche, ou encore les acteurs soutenus sont des éléments qui montrent les différences qu’il peut y avoir entre ces approches du développement. L’IE se concentre sur l’économie avec des actions en faveur des entreprises (sécurité, influence, renseignement économique) pour être compétitif, attractif et agile. L’IT adopte quant à elle une vision systémique de développement durable puisque les évolutions sociétales, les lois de décentralisation ou bien encore les différentes crises environnementales ont progressivement modifiés le système territorial. Une nouvelle attention a été portée aux territoires, dorénavant considérés comme des creusets de l’activité économique (Carayon, 2003). Au-delà des spécificités, ces deux premières approches du développement sont en réalité complémentaires et se rejoignent dans l’Intelligence Economique Territoriale (flèches en pointillées) pour le développement et l’aménagement régional. En effet, les CR ont un rôle de gestion des territoires qui demande de plus en plus de maîtrise de l’information. L'objectif est de permettre la meilleure prise de décision, mais également une explication claire de celle-ci (Dou et al., 2020). Ils sont au fil des années et des réformes territoriales françaises, devenus des acteurs dotés de capacités et compétences leur permettant d’élaborer des schémas de développements. Ce sont des responsabilités qui peuvent être cadrées, soutenues par une organisation de l’IET, c’est-à-dire une application régionale d’actions en IE et IT. D’après Dou et al. (2018), pour faire réellement de l'IE, il faut aller au-delà des entreprises et de l'environnement concurrentiel, il faut une curiosité qui embrasse tous les domaines. 3.3 La position stratégique du Conseil Régional   Le territoire Français a évolué suite à la fusion des Régions prévu par la loi NOTRé. Selon Dou et al. (2020), elle a confié aux Régions la mission de développer l'IET pour rendre tous les acteurs locaux capables d'utiliser les méthodes et outils du développement local. Le CR a un rôle de plus en plus puissant en étant le principal pouvoir organisateur des territoires (Fourquet, 2019) étant donné que l’État est devenu incitateur plutôt qu’ordonnateur, régulateur au lieu d’acteur économique (Baudelle, 2008). Mais pour organiser et gérer, il faut connaître et comprendre. Chaque Région a donc besoin d'une connaissance précise de son territoire (Bouba-Olga, 2018) car c'est une ressource stratégique pour agir. Contrairement à l’Etat, il y a une proximité supplémentaire avec les acteurs permettant de mobiliser des ressources financières, des compétences, et de faire monter à bord les autres acteurs régionaux, publics comme privés (Bauquet, 2021). De ce fait, le CR peut bénéficier d’informations qualitatives apportant une valeur ajoutée aux diagnostics puisque les analyses quantitatives à elles-seules sont insuffisantes pour comprendre les phénomènes territoriaux. Plus les décideurs vont connaître leur territoire, plus ils vont comprendre les enjeux et besoins car s’il y a des régions qui gagnent, il y a aussi des régions qui perdent (Zimmermann, 2005). Le CR peut exploiter les compétences de ses services qui ont les capacités à inventer, explorer, bousculer (Bauquet, 2021) pour mettre en &oelig;uvre des politiques de soutien et d’accompagnement. Chaque Région adopte un fonctionnement selon son orientation politique ou encore à partir des caractéristiques de ses territoires. Il est encore rare d’avoir des directions régionales entièrement dédiées à l’IE ou l’IT en France. Pour autant, il existe des services régionaux qui utilisent les pratiques en IE ou IT pour organiser leurs actions publiques. L’union de l’IE et de l’IT (flèches en pointillées) doit permettre d’aboutir à une intelligence régionale (IET au centre du schéma). Tout comme l’IE a progressivement évoluée vers l’IT, il semble que les nombreuses modifications de nos territoires (espace et politique) aient favorisé l’émergence d’une intelligence régionale. 4. Agenda de recherche Nous avons présenté le contexte, les fondements et les définitions de l’IE et l’IT afin de comprendre ce qu’est l’IET. A l’échelle d’une Région, il semble nécessaire d’associer ces deux voies de développement pour une intelligence régionale. Nos différents arguments en faveur de l’IET, ont pour but de justifier les propositions de cet agenda de recherche. <div style="border:solid windowtext 1.0pt; padding:1.0pt 4.0pt 6.0pt 4.0pt"> Encadré : La recherche en Intelligence Economique Territoriale Un groupe de travail « Régions de France – Intelligence Economique Territorial » a été créée en collaboration avec l’Etat et la Banque des territoires, afin de partager les expériences régionales. Dix Régions participent à ce groupe d'échanges permettant le travail en réseau. De plus, une charte partenariale Etat-Régions de France « Intelligence Economique Territoriale/Sécurité Economique » a été signée le 18 décembre 2019 par les ministres et le président de régions de France. Cette charte propose une méthode et des préconisations pour déployer des stratégies de souveraineté économique territoriale. A la suite des travaux, un vademecum a été publié en avril 2020 par régions de France : L’Intelligence Economique Territoriale : une ambition des Régions françaises pour la compétitivité des entreprises et des territoires. Ce rapport présente de premiers éléments de compréhension de l’IET grâce aux apports de scientifiques, chercheurs et professionnels. Enfin, des CR ont eu l’initiative d’engager la recherche sur ces problématiques d’IET avec le recrutement de doctorants associant ainsi la Région et le monde universitaire (ex : Normandie, Nouvelle Aquitaine). </div> 4.1 L'IET Régionale : dispositif ou action ?   La première voie de recherche consisterait à s’interroger sur la manière d’encadrer l’IET au sein d’une Région. La question est de savoir s’il faut organiser l’IET sous forme d’un dispositif particulier (ou avec une direction régionale dédiée) ou si ce sont des actions (IE/IT) que certains services régionaux peuvent mobiliser indépendamment. Nous avons commencé par réaliser un benchmarking pour recenser les dispositifs régionaux français existants. Plusieurs dispositifs (anciens ou récents) ont eu de premiers résultats intéressants notamment dans l’accompagnement des entreprises régionales (DRIME, SRIE Auvergne, dispositif CRAFT, dispositif d’IT en Poitou-Charentes…). Malheureusement, ils se sont progressivement arrêtés faute de coopérations et de collaborations (Moinet, 2009). Il manquait la vision à long terme alors que l’IE et l’IT s’accommodent mal du court terme puisque cette logique est contraire à la notion de développement (Moinet, 2009). Un dispositif est un « ensemble d'éléments ordonnés en vue d'une certaine fin »<a href="#_ftn1" name="_ftnref1" style="color:blue; text-decoration:underline" title="">[1]</a>, donc si la fin n’est plus celle du début, c’est le début de la fin. Le dernier ouvrage sur l’IET « Intelligence économique des territoires, théories et pratiques » dirigé par Olivier Coussi, et Patricia Auroy, fait le même bilan des dispositifs régionaux analysés. De manière générale, l’engagement des décideurs et politiques, détermine les contours et l’avenir du projet. La réussite d’un dispositif d’IET repose donc sur une nécessaire mobilisation de l’ensemble des parties prenantes d’un territoire (Lebrument & Rochette, 2020). Or, l’un des problèmes majeurs que les territoires rencontrent aujourd’hui est leur difficulté à nouer des partenariats et des projets communs de développement, impliquant conjointement des acteurs du domaine public, privé et associatif, en raison principalement des différences et spécificités des territoires et du manque d’outils de management des projets de territoire (Zardet & Noguera, 2013). L’intelligence collective reste encore une notion qui fait rêver mais qui est difficile à matérialiser (Mallowan & Marcon, 2010). Ajoutons à cela, l’éternel silo communicationnel entre services et directions qui bloquent l’évolution des projets. Nos observations actuelles au sein de la Région ne disent pas le contraire. Nos premières recherches sur le terrain font état de plusieurs actions au sein des Régions, contribuant au développement intelligent. Nous présentons quelques exemples significatifs que nous avons pu observer ou qui proviennent d’entretiens. - La Toile industrielle de Dunkerque C’est une représentation graphique (cartographie) des principaux échanges et relations qu’ont développés les industries implantées sur un bassin d’emploi. La toile est appréhendée comme une approche systémique du tissu industriel d’un territoire, visant à construire une culture commune pour aider à prendre des décisions.  - Le contrat Cadet Le contrat néo-aquitain de développement de l’emploi sur le territoire (CADET) est un dispositif dédié au développement économique. Un agent territorial appelé le cadet est au contact des entreprises avec une approche très fine du territoire. Il travaille au cas par cas sur des territoires fragiles/vulnérables car écartés des réseaux de transports ou ayant subi un sinistre économique. Il apporte une aide renforcé aux entreprises et salariés (en reconversion ou perte d’emploi). Il a une capacité d’action transversale pour l’ingénierie du territoire qui permet de porter un aménagement du territoire d’un point de vue plus local. - La politique contractuelle C’est une démarche de coconstruction visant à apporter un accompagnement et une ingénierie adaptée aux territoires et aux besoins des acteurs à travers la mise en place de contrats (entre le territoire et le Conseil Régional). Contractualiser les actions est devenu un moteur efficace de développement car c’est le meilleur moyen de piloter dynamiquement les objectifs territoriaux (Dou et al., 2020) tout en apportant des garanties aux territoires. - La DATAR en Nouvelle Aquitaine La Délégation à l’Aménagement du Territoire et à l’Attractivité Régionale est un centre de ressources et de connaissance au sein de la Région Nouvelle-Aquitaine, dont l’objectif est l’aménagement et le développement territorial. Les différentes équipes mènent des études et analyses territoriales qui permettent aux services régionaux de comprendre les acteurs et leurs espaces. Les différentes missions de veille, cartographie, ingénierie locale… permettent de développer des projets adaptées aux besoins. Seulement, des actions trop indépendantes peuvent manquer de compétences et d’information. L’absence de communication peut aussi ralentir les actions et voir émerger le même projet dans des services différents. Un dispositif bien organisé, pourrait surmonter ces difficultés et permettre une plus grande capacité d’actions. Les actions régionales en IE ou en IT ont toutes vocations à développer le territoire. Chaque direction du CR peut mettre à profit sa connaissance et ses compétences indépendamment pour mettre en place des actions sur le terrain. C’est en général ce que nous pouvons trouver dans nos régions françaises actuelles. De nombreuses actions qui pourraient être attribués à l’IET sont utilisées pour développer, rendre attractif le territoire. La direction économique utilise la boîte à outil de l’IE alors que la direction de l’aménagement du territoire va s’orienter vers l’ingénierie territoriale, locale et la connaissance plus approfondi du terrain. Pour autant, ces activités ne sont pas systématiquement assimilées et mises en place au travers de démarche scientifiques en IE ou IT pour réarmer et outiller les collectivités (Marcon, 2020). <div>  <hr align="left" size="1" width="33%" /> <div id="ftn1"> <a href="#_ftnref1" name="_ftn1" style="color:blue; text-decoration:underline" title="">[1]</a> <a href="http://stella.atilf.fr/Dendien/scripts/tlfiv5/advanced.exe?8;s=4077700920;" style="color:blue; text-decoration:underline">stella.atilf.fr/Dendien/scripts/tlfiv5/advanced.exe?8;s=4077700920;</a> </div> </div>   4.2 Une meilleure connaissance Régionale   Complémentaire à la première voie de recherche, la seconde perspective envisageable s’attacherait à la connaissance régionale qui est notre objet de recherche actuel. Maitriser la connaissance est important pour les services régionaux qui ont le devoir d’accompagner leurs territoires notamment pour faire face à la transition généralisée (climatique, écologique, énergétique, numérique) (Marcon, 2020) qui impacte la population. Nous sommes actuellement au sein d’une direction régionale qui réalise des études sur des sujets territoriaux (chômage, santé, consommation, jeunes…) afin de produire de la connaissance. Pour permettre une meilleure compréhension des territoires, la recherche scientifique a été associée aux travaux régionaux grâce au recrutement d’universitaires à des postes stratégiques. Progressivement, nous observons une évolution des pratiques, des méthodes de recherches, ou encore l’utilisation d’outils qui permettent de progresser dans la production de connaissances utiles à l’action régionale. L’ambition politique de cette Région a permis de faciliter ce lien vers l’université même si incorporer dans des services institutionnels une vision ou de nouvelles pratiques peut prendre du temps et surtout être sujet à tensions. Cette association entre la recherche et l’action régionale peut être analysée de différentes manières suscitant de fait plusieurs questions. La recherche scientifique est une possibilité d’associer des compétences au pouvoir d’action territorial. En effet, il y a plusieurs formes possibles de collaborations comme le recrutement, l’association pour un projet particulier ou encore l’utilisation de la recherche par l’intermédiaire de doctorants, de conférences… La différence se situe dans la volonté ou non de privilégier une approche sur le long terme qui est souvent un choix politique. Des recherches empiriques pourraient permettre de définir quelle relation, quelle modèle de partenariat il serait pertinent de mettre en place. Que ce soit sur une contribution ponctuelle ou une collaboration sur le long terme, cette coopération semble pourvoir apporter un mix d’expertise intéressant pour agir. Une application sur d’autres Régions ou concernant d’autres domaines (économie, sport, santé…) serait intéressante à observer. La connaissance passe aussi par la collaboration et l’échange. Nous constatons lors de nos échanges avec les chargés de missions territoriaux qu’ils ont une connaissance importante des territoires dont ils ont la charge. De même, lorsque nous interrogeons des acteurs des territoires, nous recueillons des explications et compléments d’informations très fins qui permettent de mieux comprendre les éventuelles difficultés territoriales. Pour autant, il n’y a pas la capacité à systématiquement interroger les acteurs ou d’avoir un contact permanent. La question est de savoir comment « mieux » associer la Région à la société civile qui est directement concernée par le développement territorial (Dou et al., 2020). C’est à la fois un gage de proximité, d’écoute du territoire, et en même temps une possibilité d’adopter des actions adaptées. Certaines initiatives (cadet, coconstruction de diagnostic, ateliers participatifs, concertations…) montrent les bénéfices de cette relation. 4.3 Le rôle de l'institution Régionale   Une autre voie de recherche nous semble importante à évoquer. Les Régions jouent un rôle majeur dans l’avenir des territoires (Marcon, 2020) et nous avons vu leur influence. La France a adopté la loi NOTRé qui a confié aux Régions la mission de développer l'IET afin de rendre tous les acteurs locaux du développement capables d'utiliser ses méthodes et outils pour favoriser le développement local (Dou et al., 2020). Cette capacité pose la question de l’implication et des moyens d’actions. La recherche peut s’intéresser à déterminer le degré d’intervention, le soutien voir la transmission de compétences qu’un CR peut apporter. Un Conseil Régional doit-il simplement accompagner les territoires avec des actions, ou a-t-il aussi une mission de transmission de compétences aux acteurs pour qu’ils deviennent plus autonomes ? Un mix entre l’intervention et la liberté, l’accompagnement ou le laisser faire. Selon le territoire, la relation de la Région est à adapter pour apporter un développement équilibré ou les deux approches Top-down et Bottom-up se rencontrent. Certains territoires ont une grande maturité en termes d’ingénierie, de capacité à penser à connaitre leur territoire et à construire des politiques. En effet, un territoire qui a une capacité en ingénierie, des infrastructures développées ou encore une gouvernance capable de construire des politiques n’a pas le même besoin d’investissement de la part du CR qu’un territoire sans structure organisée et avec des problématiques majeures (mobilité, chômage, santé…). Chaque territoire en fonction de ses spécificités, de ses atouts, de ses faiblesses, peut se doter d’une IT propre qui deviendra la clé de son développement (Marcon, 2020). Cette proposition d'agenda montre l'étendue et la richesse des perspectives d’études en IET. Les Régions sont des objets d’études qui suscitent depuis toujours de nombreuses recherches en France et à l’étranger. Les récentes évolutions régionales semblent avoir favorisé l’émergence d’une IET où la science peut jouer un rôle important. Conclusion L'IE et l'IT sont deux champs de recherches à l'origine commune. L’Intelligence Economique Territoriale dans une vision transversale et systémique du territoire, est un compromis entre ces deux approches pour le développement intelligent d’une Région. Le Conseil Régional en tant que première instance de l’agir stratégique collectif (Marcon, 2020) pour les territoires a la possibilité de se saisir de l’IET pour développer la Région. L’organisation, les compétences et la méthodologie sont des pistes de réflexions de l’IET : une intelligence régionale au service des territoires. Bibliographie Baudelle, G. (2008). L’aménagement du territoire à l’heure de l’Europe des 27, une nouvelle donne. In Aménagement du territoire (Presses universitaires de Caen, p. 119‑127). Baumard, P., & Harbulot, C. (1997). Perspective historique de l’intelligence économique. Revue d’Intelligence Economique, 1(1), 50‑64. Bauquet, N. (2021). Régions : Le renouveau de l’action publique [Note]. Institut Montaigne. Belaouni, D., & Berass, D. (2017). 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Auteurs

Ali Amairia

Doctorant

University of Poitiers

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